A priori, tout roule à vélo pour les séniors et les bienfaits s’enchaînent : sollicitation cardiaque douce, pas de choc articulaire, Malgré ce cadre idyllique, SANTESPORTMAG vous invite à compenser les manques et pondérer les risques … pour profiter de tous ces bienfaits.
Par le docteur Stéphane CASCUA, médecin du sport.
Vous aimez le vélo ! Vous êtes plutôt promenades tranquilles sur pistes cyclables. Peut-être préférez vous les parcours de cyclotourismes voir les cyclosportives ? Sachez que pour votre cœur ou vos vaisseaux, ça n’a rien à rien à voir ! Vous pédalez pour éviter les impacts articulaires et éviter l’arthrose. Mais vos os ! Avez-vous pensé à solidifier vos os ?
Entre bicyclette et cyclisme, mon cœur balance
Le vélo est une activité d’endurance. Les gros muscles des membres inférieurs réclament de l’oxygène pendant plus de 30 minutes et le cœur est mis à contribution. Son intensité est très variable, les bénéfices et les risques cardiovasculaires aussi ! Les balades à l’ile de ré sur pistes cyclables ou les déplacements urbains sur « vélib’ » ou autre « vélov » s’effectuent en aisance respiratoire. Ils sont à rapprocher de la marche à pied. La bicyclette est une activité physique mais pas un sport ! C’est bien pour renouer avec l’exercice mais il faut pédaler longtemps pour recueillir des bénéfices notables ! Faire du vélo à intensité moyenne telle que vous puissiez «parler mais pas chanter» correspond plus volontiers aux recommandations des cardiologues. Il suffit de 30 minutes à 1 heure, 3 fois par semaine pour recueillir les bienfaits cardiovasculaires de ce sport. Le week-end, de belles virées cyclotouristes peuvent inclure des cessions à cette intensité. En semaine, ce type de séance est idéale sur vélo d’appartement … une petite piqure de rappel pour un vrai plaisir dominical.
Enfin, si vous faîtes des cyclo-sportives, sachez que les cardiologues ont classés la compétition cycliste comme une pratique très contraignante pour le cœur. Selon ce consensus international, cette discipline associe un maximum de stress dynamiques et statiques. Les premières occasionnent une très fortes élévation de la fréquence cardiaque, parfois même jusqu’au maximum. Les secondes sont liées à des contractions musculaires puissantes qui écrasent les vaisseaux sanguins et engendre une très forte élévation de la tension artérielle (voir l’article consacré à l’Hypertension artérielle, dans ce numéro). Chez le sénior, un bilan médical consciencieux et une épreuve d’effort s’imposent pour limiter les risques et profiter des bienfaits d’une pratique aussi intense.
Entre arthrose et ostéoporose, le vélo a choisi
Le mouvement de pédalage permet le rodage des articulations sur de grandes amplitudes sans impactions du poids de corps. C’est particulièrement vrai pour la hanche, c’est également le cas pour le genou. Son efficacité est controversée au niveau de la rotule : sur de gros braquets, vous rabotez son cartilage et il s’abîme ; en moulinant vous le polissez, il devient plus régulier. Sur toutes ces articulations, les faibles variations de pressions subis par le cartilage pompent les aliments venus du sang. En pédalant vos muscles se renforcent et guident mieux le mouvement articulaire, préservant d’autant le cartilage. Le vélo entretient vos articulations et luttent efficacement contre l’arthrose.
Malheureusement, l’absence d’impact du poids de corps n’a pas que des avantages. Une étude a mis en évidence que 69% des cyclistes professionnels présentaient une densité osseuse inférieure au sédentaire du même âge. La pratique d’un « sport porté » n’entraînant aucun choc osseux, 4 heures par jour, prive ces individus de pesanteur pendant la même durée. De fait, l’os se désadapte et se fragilise ! Bien sûr, le vélo de loisir n’a pas les mêmes conséquences mais cette étude démontre que ce sport n’améliore pas du tout la résistance des os. Sa pratique exclusive est déconseillée, il faut aussi marcher et courir. Les microtraumatismes osseux stimulent les processus de reconstruction, oriente efficacement l’architecture des fibres microscopiques et accroît la densité des os.
Votre dos découvre le « syndrome du grand singe »
Sur votre vélo vous êtes légèrement penché en avant, les deux mains légèrement écartées, en appui sur le guidon. Votre position ressemble étrangement à celle de nos cousins quadrupèdes, les gorilles et autres grands singes. Votre colonne vertébrale cet équilibre ancestral retrouvé. Si souffrez du dos, vous pouvez, le plus souvent pédaler avec plaisir ! Quelques remarques modèrent cet enthousiasme initial ! A vélo, vous ne bougez pas vos vertèbres. Pourtant, les articulations sont faites pour s’articuler ! Les disques ne tardent pas à se tasser vers l’avant et à bomber vers l’arrière : vos douleurs réapparaissent. Une solution existe : apprenez à lâcher le guidon, redressez-vous et creusez votre dos régulièrement. Si vous pratiquez en compétition, vous recherchez l’aérodynamisme, vous êtes plus fléchis que la nature vous le propose spontanément. Plus rapidement encore, votre dos commence à tirer ! Faites preuve de pragmatisme, remonter un peu votre potence et votre guidon, votre confort contribuera à améliorer vos performances ! Si habituellement, le vélo n’occasionne pas de douleur lombaire, il est peu efficace comme rééducation. Il n’apprend pas à la colonne vertébrale à assumer le poids du corps et l’instabilité de la bipédie. Des exercices de renforcement et de coordination complémentaires sont obligatoires pour tourner le dos aux lombalgies de la vie quotidienne.
N’ayez pas honte du « nerf honteux » !
Lors des entraînements prolongés, penché en avant, il arrive que le nerf innervant les testicules et la verge soit comprimé. La sensibilité de la zone risque d’être réduite dans les heures qui suivent. Parfois même c’est la commande d’ouverture des vaisseaux locaux qui ne se fait plus. Notre cycliste passionné risque de présenter des troubles de l’érection. Apriori, ils régressent spontanément et rapidement … à moins que ces longues virées ne se reproduisent trop fréquemment ! La prévention du « syndrome du nerf honteux » passe par une flexion du buste plus modérée, de fréquent passage en danseuse, un bon réglage du bec de selle qui ne doit pas être trop relevé.
Les entraînements intensifs sont également à l’origine d’un épuisement hormonal. Dans sa forme caricaturale, ce constat a été fait chez les professionnels de la grande boucle. En son temps, il a permis à des médecins peu scrupuleux de parler de «compensation» pour justifier le dopage par les hormones mâles. Chez le seniors déjà victime d’une érosion de sa production hormonale, il est de bon ton de limiter la difficulté des entraînements sous peine de voir la libido régresser. Lorsque le cycliste a pris conscience de ces effets et continu à s’entraîner, les psychiatres parlent de « sublimation ». Ce comportement volontaire vise à l’apaisement des pulsions. Ainsi notre cycliste tente de s’adapter aux désirs féminins souvent affectés à cet âge charnière de la vie. Néanmoins, il est bon de rester raisonnable car les hormones masculines sont également anabolisantes et contribuent efficacement à l’entretien des os et des muscles. Quoi qu’il en soit, une pratique adaptée du vélo reste bénéfique à la santé et à l’épanouissement de chacun. Il a été démontré que faire un sport d’endurance, 30 à 1 heure, 3 fois par semaine, réduisaient notablement les « pannes » et les troubles de l’érection chez les hommes de plus de 40 ans !
Le vélo plus dur que la marche ?
La bicyclette a quand même été conçue pour faciliter les déplacements ! Pédaler permet d’aller plus vite, plus aisément ! Cependant, en côte, la situation dégénère rapidement. Il faut monter le poids son corps et celui de son vélo ! Quand la vitesse diminue l’équilibre devient précaire ! Épuisement et instabilité se conjuguent pour vous faire descendre de vélo et … vous transformer en marcheur ! Vous êtes à pied mais soulagé !
En pratique, le vélo sur terrain plat est activité physique légère, idéale pour se réconcilier avec le mouvement ! Dès que « ça monte », le vélo devient un sport … un vrai ! L’humilité s’impose, utilisez les petits braquets (grands pignons et petits plateaux) et « moulinez ». En région montagneuse, les sédentaires repentis doivent, pendant quelques temps, préférez la marche et la randonnée !
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